Quand on ne s’y intéresse pas, on peut penser que la Normandie n’est pas une terre de surf. Toutefois, la région compte un bon nombre de surfeurs, et ce, depuis longtemps déjà. Immersion dans la réalité du surf normand avec Gabriel Brot, Victor Beharelle et Bazile Pinel.
Si la Normandie est moins connue pour le surf que le Sud-Ouest ou la Bretagne, la région abrite bien plusieurs spots1. Proche du Havre, on retrouve le spot rocheux d’Étretat et celui de Trouville-sur-Mer. Du côté de Dieppe, le spot de Pourville-sur-Mer offre lui aussi de belles vagues. Mais c’est probablement dans le Cotentin que l’on trouve les meilleures vagues normandes, à Sciotot, Siouville-Hague, ou sur le spot historique du Rozel.
Dédication au surf : Gabriel Brot
Gabriel Brot est l’un de ces Normands qui surfent depuis leur plus jeune âge et qui ont dédié leur vie à ce sport. Champion du Normandie Open de 2013, il est aujourd’hui moniteur diplômé et tient l’école de surf de Sciotot, Sciotot Surf School.
Comment en es-tu venu au surf ?
“Je suis venu au surf avec le bodyboard. Comme tous les gamins qui faisaient du body, j’aimais vraiment ça, j’en faisais tous les jours l’été. Après, mon frère a commencé le surf. Dans ma famille, beaucoup de cousins à moi surfent. J’ai testé et j’ai directement accroché. Je me suis inscrit au club de Siouville vers 10 ans, puis j’ai commencé les compétitions.”
Le club de Siouville, le Cotentin Surf Club, a ouvert au début des années 2000 et s’est imposé comme l’un des principaux acteurs du surf en Normandie. Il organise notamment quelques compétitions, comme le Siouville Surf Open ou les Championnats de Normandie qui se déroulent chaque année.
Qu’en était-il des opportunités quand tu étais jeune ?
“Avant, il y avait des coupes de Normandie et des Championnats de Normandie. Généralement, ça se passait à Siouville ou Sciotot, et de temps en temps il y avait quelques étapes à Trouville, Pourville et Quiberville. Tous les ans, il y avait une équipe qui descendait sur les championnats de France. Il y avait quelques déplacements sur les coupes de France, quand il y avait l’occasion d’y aller, et le budget aussi. On partait souvent. Les championnats de France à tous les coups, et des coupes de France il y en a aussi eu pas mal de faites. Après, quelques petites compétitions régionales.”
Cette année, le collectif « Espoirs Terre Bleue », lancé par le Cotentin pour valoriser les pratiques nautiques, a accompagné 12 athlètes normands dans 12 catégories aux Championnats de France de Surf 2024.
Où est-ce que tu surfes le plus souvent aujourd’hui ?
“À Sciotot, vu que j’ai mon école là-bas. Après, ça dépend des conditions. Je surfe surtout dans la baie de Sciotot, de Siouville, et la baie de Surtainville, c’est là qu’il y a le plus de vagues. Plus haut, c’est surtout des spots de replis qui marchent l’hiver qui sont bien à surfer. Plus bas, ça capte beaucoup moins la houle, c’est la même orientation, mais avec moins de vagues.”

© – Loris Delande
Qu’est ce qui fait la spécialité du surf normand ?
“La tranquillité et l’espace. Ce qui est bien en Normandie, c’est que c’est vaste donc il y a de la place pour surfer. Il n’y a pas de pic défini, peu importe la baie que tu prends, les trois (Sciotot, Siouville et Surtainville), si tu marches un peu tu peux surfer tranquille. Ce qui n’est pas du tout le cas du sud-ouest.” Il confie en rigolant : “En vrai, je préférerais surfer dans le sud !”.
En tant que moniteur de surf, qu’en est-il de l’affluence ?
“Il y a du monde pendant les vacances scolaires, surtout l’été. Le plus gros de la saison, c’est l’été. Pendant les vacances scolaires, il y a pas mal de monde qui vient, après, tout dépend de la météo. Cette année, il y a eu un peu moins de monde que l’année dernière.”
Observes-tu une démocratisation du surf en Normandie ?
“Oui, carrément. Avant, il n’y avait pas grand monde, à part les locaux. Déjà, les gens ne venaient pas parce qu’ils ne connaissaient pas Siouville et la région. Pour eux, il n’y avait pas de vagues ici. En plus de ça, il y a eu après le Covid une explosion du nombre de pratiquants, que ce soit ici ou ailleurs. Et du coup, il y a carrément plus de monde qui vient. Beaucoup de gens viennent de Caen, de Paris, des Pays-Bas ou d’Allemagne. Ça commence à être connu qu’il y a des vagues ici.”
L’ambiance à l’eau a-t-elle changé avec cette démocratisation ?
“Non, pas vraiment. Ici, ça va. Bon forcément ça peut être tendu s’il y a beaucoup de monde et qu’il y en a qui font n’importe quoi dans l’eau. Mais ça n’arrive pratiquement jamais. On est pas du tout sur du localisme2 comme il peut y avoir dans le sud-ouest.”

© – Daniel Enchev
Les surfeurs des terres
À l’image de cette nouvelle génération de surfeurs normands, on retrouve des jeunes comme Victor Beharelle. Après avoir commencé le surf dans des camps de vacances lorsqu’il était plus jeune, il s’est mis à surfer sur la côte normande. Ainsi, cela fait trois ans qu’il combine sa vie à Rouen avec le surf du côté de Pourville-sur-mer, mais les conditions ne permettent pas toujours de prévoir des sessions de surf régulièrement.
“Il faut bien regarder les conditions avant, tu ne peux pas trop te dire le week-end prochain, je vais surfer parce que j’en ai envie, ça dépend vraiment des vagues.”
Mais lorsque les disponibilités s’alignent sur les conditions, la bonne ambiance est au rendez-vous. “Il n’y a pas vraiment de monde, même si depuis quelques années, il commence à y avoir de plus en plus de gens. En fait, à l’eau, tout le monde est hyper sympa. À chaque fois, on discute avec des gens, on rigole. Il y a toujours les trois-quatre locaux qui sont à fond dans leur truc, et derrière, tu rencontres des gens qui viennent de temps en temps.”
- Un spot est un endroit où les surfeurs pratiquent leur activité ↩︎
- Le localisme est un phénomène dans lequel les surfeurs locaux tentent d’empêcher les touristes de surfer sur « leurs » spots. ↩︎






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