Sur son petit nuage, Terence Atmane continue de briller au Masters 1000 de Cincinnati. À 23 ans, le Boulonnais, 136e mondial, s’est mué en véritable top player pour atteindre sa toute première demi-finale en Masters 1000, où il défiera le numéro 1 mondial Jannik Sinner. Une semaine de haute volée qui lui offre son entrée dans le Top 100 et met fin à plus de deux années de disette pour le nord de la France dans l’élite mondiale. Une performance qui restera gravée.

À moins de deux semaines de l’US Open, peu imaginaient voir le nom de Terence Atmane sur toutes les lèvres. Arrivé dans l’Ohio à la 136e place mondiale, avec un seul succès sur le circuit ATP cette saison, le Français semblait loin des radars. Miné par des contre-performances et marqué par une sortie médiatique très commentée après Roland-Garros¹, le Boulonnais a pourtant trouvé le déclic. Son coup droit, que Richard Gasquet n’hésite pas à comparer à celui de Rafael Nadal, a enfin explosé… et au meilleur des moments.

Une véritable révélation

Parti, comme souvent cette saison, par la petite porte des qualifications, Terence Atmane a mis à profit son expérience pour installer son jeu avec assurance. Sur sa surface favorite, le dur, le jeune français a fait parler son atout majeur : son explosivité. Impassible et plus serein dans la construction de ses points, le Nordiste confie « jouer son meilleur tennis depuis des mois. » Une confiance qui s’est traduite immédiatement sur le terrain. Sorti des qualifications sans concéder le moindre set, le Tricolore a lancé son tournoi avec une victoire maîtrisée contre Yoshihito Nishioka (6-2, 6-2), avant de se préparer à défier sa première tête de série, l’Italien Flavio Cobolli, 22e joueur mondial. « Je savais que ce match serait un vrai test, mais j’avais envie de me mesurer aux meilleurs et de profiter de l’opportunité », ajoute-t-il.

Une opportunité que le jeune joueur de 23 ans a su saisir de la plus belle des manières. Opposé à l’Italien dans un match complètement fou (6-4, 3-6, 7-6), Atmane a puisé dans ses ressources pour s’imposer malgré une douleur persistante au pied. Un signe de résilience et de caractère, lui qui a refusé de lâcher le moindre point. Une gêne finalement vite reléguée au second plan, tant ses performances suivantes ont été spectaculaires.

Un exploit qui change tout

Avant d’arriver dans l’Ohio, Terence Atmane n’avait encore jamais battu un joueur du Top 20 mondial. Face à l’Américain Taylor Fritz, 4e joueur mondial, le Français avait donc une double mission : prendre sa revanche sur celui qu’il avait titillé à Shanghai (6-7, 6-7) et, dans le même temps, décrocher pour la première fois de sa carrière une place dans le Top 100 mondial. Une mission que beaucoup jugeaient comme impossible. « Je savais que si je donnais tout sur chaque point, je n’avais rien à perdre et tout à gagner », assurait l’intéressé avant le match. Lorsqu’il est entré sur le court, tout le monde a vite compris que ce serait lui, et lui seul, qui déciderait de l’issue de ce duel.

Dans un duel de cogneurs, où les coups gagnants pleuvaient des deux côtés, le Nordiste a su rester lucide malgré la perte du premier set. « J’étais conscient qu’il [Fritz] allait commencer très fort. Le plus important, c’est ce sursaut d’orgueil qui m’a permis de revenir », analysait le natif du Pas-de-Calais après la rencontre. Ce sursaut, il l’a incarné en prenant la balle plus tôt qu’à l’accoutumée, s’offrant ainsi la possibilité d’imposer son rythme. Une audace récompensée par 13 aces et 34 coups gagnants, qui lui ont permis de faire tomber le quatrième joueur mondial et de s’offrir, pour la première fois de sa carrière, un « classement à deux chiffres » ! 

24 heures de repos ont suffi

Vingt-quatre heures plus tard, Atmane revient sur le court avec la confiance d’un homme persuadé de pouvoir inquiéter n’importe quel joueur. Et face au neuvième mondial Holger Rune, il ne s’est pas contenté d’inquiéter ; il a dominé. Victoire nette 6-2, 6-3, en à peine 1h13, avec une première balle quasi imprenable et un flux de jeu impressionnant. « Avec ce niveau-là, j’avais l’impression que je pouvais battre n’importe qui se tenant en face de moi », avouait-il après le match.

Ce triomphe l’envoie non seulement en demi-finale d’un Masters 1000 pour la première fois, mais le catapulte aussi à la 69e place mondiale. « Je ne pense pas que des mots puissent décrire ce que je ressens maintenant… C’est vraiment dingue, je n’y crois pas. Me retrouver dans le dernier carré d’un Masters 1000, entrer enfin dans le Top 100 et gagner ce match… Je suis très ému », a-t-il confié après coup. Mais le tournoi est encore loin d’être terminé. Dans un duel aux allures de David contre Goliath, Terence Atmane se présentera face au numéro 1 mondial et récent vainqueur de Wimbledon, Jannik Sinner. Un dernier carré que le Nordiste abordera avec détermination et la volonté de ne « se fixer aucune limite. »

Après deux ans de disette, un Nordiste retrouve le Top 100  

À Cincinnati, Terence Atmane n’a pas seulement signé la plus belle semaine de sa jeune carrière, il a aussi rallumé la flamme d’un tennis nordiste en quête de héros. Avec ce parcours sensationnel, le Boulonnais a mis fin à une disette qui semblait interminable. Depuis plusieurs années, le nord de la France ne s’imposait plus comme un vivier de talents sur la scène mondiale. Le dernier à avoir hissé haut les couleurs des Hauts-de-France dans le Top 100, Constant Lestienne, y avait passé un an, atteignant même le Top 50 en février 2023, avant d’en sortir quelques mois plus tard.

Cette fois, le flambeau change de main. Et si le passage de témoin a pris deux longues années, il porte désormais l’espoir d’un retour durable du Nord dans l’élite. Car avec Terence Atmane, ce n’est pas seulement un joueur qui s’installe… c’est toute une région qui revient frapper à la porte du très haut niveau, et qui compte bien la laisser grande ouverte.

1. Décrié pour son attitude jugée nonchalante. ↩︎

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Axel Marc

© – Virginie Bouyer/L’Equipe